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Quand la danse swing permet d’explorer sa relation aux autres

*Cette publication reflète mon vécu, ma propre expérience et mes observations.*


En naturopathie, la pratique d’une activité physique régulière, modérée et adaptée fait partie des trois techniques majeures recommandées dans un programme d’hygiène de vie. Les intérêts sont multiples sur tous les plans de l’être : sur le plan physique (on active les organes qui évacuent nos déchets, on favorise l’activité du système digestif, on améliore la circulation sanguine et lymphatique, on entretient nos muscles, on sécrète des hormones et notamment celles du bien-être etc.), sur le plan émotionnel (satisfaction de soi, plaisir), sur le plan mental (moins de pensées ruminantes, instant présent, focalisation sur la technique et le plaisir), sur le plan socio-culturel (lien social favorisé notamment pour les activités en couple ou en équipe) et sur le plan éco-planétaire (pour les activités en extérieur, dans le respect de la nature).


Dans cette publication, je souhaite aborder une activité physique particulière, la danse, et encore plus spécifiquement la danse swing, que j’affectionne grandement depuis de nombreuses années. Je mettrai l’accent sur son impact sur le plan socio-culturel et sur le plan physique. Pour avoir pratiqué les claquettes américaines pendant plus de 10 ans et le lindy hop / charleston pendant près de 5 ans, je peux vous dire que le swing est une danse assurément sociale. Dynamique, vivante, enjouée, énergique, la danse swing est en effet également une danse de relation à l’autre, dans la performance scénique et en dehors de la piste.


Le swing, une danse de relation à l’autre


Tout au long de mes années de cours, j’ai été amusé de voir que la danse swing nourrissait mes réflexions sur les interactions sociales, sur ma manière de communiquer, de façon non-verbale surtout, et de me comporter. Pour moi, la danse permet de développer des compétences en savoir-être. En claquettes, en tant que « percussionniste des pieds », lorsqu’on exécute des chorégraphies en groupe par exemple, on apprend le rythme, l'écoute, l’harmonie. En tant que lindy hopper, on apprend l'écoute du partenaire, la transmission d'un message subtil et intuitif, la construction en couple d’une « œuvre ». Et pour ces raisons, la danse swing m’a permis d’être plus conscient de mon corps et, parfois, plus conscient dans mes relations.


Je me souviens d’un certain nombre de principes que l’on nous expliquait dans les premières années, posant les bases de la danse swing en couple. Ces principes m’ont marqué, parce qu’elles trouvaient leurs fondements dans la relation à son propre corps et dans la relation à autrui. Et on nous l’expliquait comme tel !


La communication par les sensations au niveau corporel. En danse swing, de nombreuses informations sont transmises par le corps. Dans le lindy hop, qui est une danse de couple où les corps sont en contact quasi-permanent, le mouvement et l’intention du mouvement, même à peine perceptibles, sont un signal au partenaire. Ainsi, si l’un-e hésite, l’autre ressent l’hésitation. De même, en mettant une intention de direction, de rythme différent ou d’arrêt, les corps des partenaires ressentent cette intention. Dans mes premiers cours hebdomadaires, on nous expliquait que ces signaux sont ressentis comme ils peuvent l’être dans la vie quotidienne aussi : marchant bras dessus bras dessous avec une personne, ou même main dans la main, je peux ressentir lorsque la personne perçoit un danger sur la route, initie un changement de rythme de marche ou hésite dans la direction à prendre. Cette communication corporelle passe par une certaine conscience du corps et dans la conscience de l’instant présent.

 

Harmonie et équilibre dans la façon de danser et de marcher. En danse swing, il y a une démarche naturelle, harmonieuse, équilibrée, presque de l’ordre de l’évidence, et qui est toutefois plus amplifiée. En charleston par exemple, le mouvement de balancier des bras correspond celui de la marche - le bras en opposition avec l’autre jambe -, mais est beaucoup plus marqué. La danse swing – que ce soit en claquettes ou en lindy hop – m’a permis d’approfondir davantage la connaissance de mon corps, de développer mon équilibre postural, et les années passant, une coordination plus harmonieuse entre les différentes parties du corps.

 

Entretien de la mémoire. Parce que la danse swing reste une danse avec des codes et des techniques, la pratiquer permet aussi de stimuler le cerveau : l’apprentissage d’une nouvelle discipline, la mémorisation mentale puis corporelle des pas et des chorégraphies, la rencontre avec de nouveaux partenaires de danse à chaque cours, la formation auprès d’enseignants différents… tout ceci participe à la stimulation du cortex et à l’entretien de la mémoire. Dans la vidéo ci-dessous, on voit la danseuse de swing Jean Veloz connue pour ses rôles dans les comédies musicales des années 1940 et 1950, toujours sur scène à 88 ans avec un style enjoué et des portés impressionnants !



Respirer et sourire. Au tout début des cours de danse swing, souvent, nous étions tellement focalisés sur la technique et les chorégraphies qu’il nous arrivait parfois d’oublier de respirer de manière plus souple et de sourire, au grand dam des professeurs qui nous le rappelaient aussitôt. Pour moi, le swing est une danse qui offre de la respiration, qui ouvre le corps et le cœur et qui invite à sourire, pour soi et pour l’autre. Cela m’est venu au fur et à mesure de l’acquisition du rythme et de la technique.

 

On danse avec tout le monde. S’il y a une émotion liée à la danse swing, c’est bien la joie. Que l’on soit en salle de cours, en pratique/entraînement ou dans un bal swing, on constatera toujours de l’amusement et de la gaieté sur les visages des danseurs-ses. C’est parce que la danse swing est une danse sociale, inclusive, qui prône l’ouverture et qui invite aussi à la réjouissance et au jeu : ainsi, dans tous les contextes, les personnes débutant en swing trouveront des partenaires plus expérimenté-e-s avec lesquel-le-s danser, quel que soit leur genre ; dans les cours que j’avais suivis, on invitait les élèves à danser avec un maximum de partenaires sur un modèle inspiré des ruedas en salsa ; enfin, la culture du lien social et de la joie, dans la créativité et dans l’improvisation, sont ce que l’on retrouve dans l’esprit des bals, et c’est ce qui m’a toujours marqué et plu.

 

Tenir son cadre, faire respecter son cadre et respecter l’autre. Comme dans la vie personnelle ou professionnelle, lorsqu’on évolue dans un milieu où la collaboration est nécessaire, on se respecte et on respecte les membres de l'équipe. Dans la danse swing, le même esprit règne : on tient et on respecte son cadre, grâce au maintien de son buste, mais on respecte également son partenaire de danse. De la même façon que la communication peut passer par les sensations corporelles, il s’agit dans cette danse d’inviter le-la partenaire à suivre son mouvement. Cela passe par l’intention, transmise par le regard, par le mouvement des bras et le déplacement du corps. Mais c’est évidemment toujours une invitation et il n’y a pas de « force » en jeu : le-la partenaire doit se sentir libre de suivre ou non le mouvement. Dans la danse swing, pour moi, il y a le respect du consentement et le respect du souhait de l’autre que je trouve absolument formidables. Il est important également de ne pas avoir trop de mouvements parasites, qui pourraient induire en erreur le-la partenaire dans l’intention et dans la communication. La danse swing est de la cocréation, avec une communication optimale.


Leader et follower. Dans les cours que j’ai suivis, on ne parlait pas d’homme ni de femme pour nommer les danseurs en couple mais de leader et follower. Dans cette danse, le rôle de meneur n’est pas nécessairement assigné à l’homme : en effet, en lindy hop, un homme peut avoir envie de suivre le ou la leader, et une femme peut avoir envie de mener la danse.

 

Le leader, toujours leader ? Et d’ailleurs, le follower n’est pas que suiveur : il-elle a toute une latitude pour déployer sa créativité dans son champ d’action, et peut même parfois induire des changements de directions ou d’intention différents de ceux impulsés par le leader. Il y a la notion d’écoute et de respect de ce que propose l’autre, comme au théâtre en improvisation : on compose avec ce que l’autre nous propose, on accepte et on construit ensemble. Il y a une belle liberté du couple dans cette danse : une liberté de création et de mouvement.


Le corps, ce « vêtement sacré »

 

J’ai récemment lu Mémoire de la danse, autobiographie de Martha Graham, danseuse et chorégraphe américaine, considérée comme l'une des plus grandes innovatrices de la danse moderne et l'une des fondatrices de la danse contemporaine. Elle y écrit cette magnifique phrase :


« Le corps est un vêtement sacré. C’est le premier et le dernier vêtement, celui avec lequel on pénètre dans la vie, avec lequel on la quitte ; il faut le traiter avec respect, avec joie, et aussi avec crainte. Mais toujours, il faut lui rendre grâces ».

J’aime voir le corps comme un véhicule de notre âme, de notre esprit, qui nous mène là où nous avons besoin d’aller ; j’aime aussi cette vision du corps comme un vêtement qui nous habille, dont il faut prendre soin et qu’il est important de remercier.

 

Le corps est aussi ce qui nous permet d’être en relation à soi et en relation aux autres. Proposer de re-explorer, par la danse, son rapport à soi, aux autres est une façon d’accompagner une personne de façon holistique : les bénéfices au niveau physiologique s’ajoutent au fait que l’on insère de nouveau la personne dans un cadre qui est plus grand qu’elle, en favorisant les liens sociaux, relationnels. Et si cela est adapté, on peut par exemple le faire par la danse swing ! Je fais ici un lien avec la prescription sociale, démarche médicale qui prend de plus en plus d’essor outre-Manche et dont je parlerai dans un prochain article.

 

Enfin, pour celles et ceux qui me découvrent à travers cette publication, j’écris de façon plus habituelle à propos de la santé, de la naturopathie, de la relation d’aide et de l’écologie. Avec cet article, je me permets une écriture plus enjouée et presque digressive pour ce bel art de la danse swing, qui me passionne depuis tant d’années, et qui est pour moi un facteur de lien social important en plus d’être une danse optimiste, joyeuse et rythmée.


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